Cédric - Dimanche 11 Juin 2023

Vous avez un sommeil léger ? Mangez des protéines !

Certains d'entre nous ont un "sommeil de plomb", et d'autres se réveillent au moindre bruit. Si une corrélation était imaginée jusqu'alors par les scientifiques entre le cerveau et la qualité de sommeil, une recherche récente révèle que la responsable de notre sommeil serait en réalité une protéine produite par... nos intestins !

Des neurobiologistes de la Harvard Medical School ont récemment publié le résultat de leur recherche concernant le rapport direct entre la profondeur du sommeil de mouches et de souris, et leurs intestins. Les tests ont porté sur l'analyse du rôle de 3 400 gènes de drosophiles (mouches).


Photo: Polina Kovaleva / Pexels

Les gènes qui régulent le sommeil chez ces dernières sont les mêmes que chez la souris. Des stimuli ont été soumis aux mouches via des vibrations pendant leur sommeil. Pendant ce temps, et au fil des niveaux de stimuli, les chercheurs ont relevé l'expression des gènes (processus biochimique permettant à un gène de fabriquer des molécules). Ils ont identifié environ 160 gènes ayant un impact sur la qualité de sommeil de l'animal.


Parmi ces gènes, ou plus précisément parmi les protéines qu'ils produisent, une en particulier semblait avoir un rôle majeur dans la profondeur du sommeil: la protéine nommée CCHa1. Les chercheurs ont donc concentré leur recherche sur cette dernière et se sont aperçus que lorsque son "expression" était bloquée, les mouches se réveillaient à la moindre vibration alors qu'au contraire, lorsque cette protéine était fabriquée en quantité, les drosophiles dormaient à poings fermés et ne se réveillaient que face à de fortes vibrations. Si cette protéine est produite tant dans le cerveau que dans l'intestin, il s'avère contre toute attente, que c'est son élimination au sein de l'intestin qui a présenté un impact dans l'éveil des mouches.

Etant donné que les cellules qui sécrètent cette protéine dans l'intestin sont activées par des protéines alimentaires, les neurobiologistes ont supposé qu'un régime riche en protéines serait susceptible de favoriser directement la profondeur du sommeil. Après avoir approfondi leurs recherches, ils ont pu confirmer leur suspicion: en appliquant un régime alimentaire intégrant un mélange de protéines aux mouches, le niveau de CCHa1 dans leurs intestins augmentait significativement et les mouches dormaient plus profondément. Par ailleurs, ils ont constaté que plus le régime était appliqué dans le temps, plus l'augmentation de CCHa1 était importante. A l'inverse, des apports en sucre ou en matières grasses n'affectaient en rien leur sommeil.

La protéine CCHa1 se déplace en effet de l'intestin au cerveau, et vient agir sur des neurones spécifiques: les cellules PAM (Protocerebral Anterior Medial). Il s'agit d'un groupe de neurones producteurs de dopamine, connue habituellement pour véhiculer un message associé au plaisir et générant de l'excitation, mais qui dans le cas présent agit au contraire comme un élément venant approfondir le sommeil. Ainsi, il y aurait un lien direct entre l'alimentation de l'animal et sa qualité de sommeil.


Dans la suite de leurs expériences, les scientifiques ont réveillé les mouches avec un autre stimuli: la température. Dans ce cas, ils ont constaté que la protéine CCHa1 n'était pas impliquée dans les différences de réveils. L'équipe envisage désormais de poursuivre ses recherches, afin d'identifier précisément les protéines impliquées dans les différents modes de réveil des drosophiles. Ils ignorent à ce stade si ces premiers constats sont transposables à l'Homme.
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