Dans la célèbre grotte de Lascaux, symbole haut en couleurs de la préhistoire, l'air ne circulerait plus naturellement, en raison d'une montée des températures au-dessus de la grotte. Un phénomène qui pourrait expliquer en partie le développement des champignons sur les fresques. C'est l'hypothèse qu'a permis de valider le simulateur Lascaux, développé dans les locaux du laboratoire "Transferts, écoulements, fluides, énergétique" (Trefle), à Bordeaux.
Le simulateur Lascaux permet de visualiser la chaleur diffusée au-dessus de la tête d'un visiteur
dans la grotte de Lascaux.
On le sait, la grotte de Lascaux reste en période de longue maladie: les micro-organismes qui l'ont affaiblie ces dernières années menacent toujours. C'est pour les contrer que les spécialistes ont mis au point le simulateur Lascaux, un outil précieux qui s'attache à reconstituer la circulation de l'air dans la grotte et son impact sur les fresques découvertes en 1940. Pour les scientifiques, cet outil constitue une véritable porte d'entrée sur un lieu fermé au public depuis 1963. Seuls quelques experts peuvent pénétrer dans la grotte, dans la limite de 20 à 50 heures de présence humaine par semaine: la chaleur des corps et le CO2 dégagés de façon trop importante auraient vite fait de bouleverser un équilibre difficile à maîtriser, au plus grand profit des taches noires et des moisissures blanches. D'où l'intérêt du simulateur: "C'est l'outil le moins intrusif possible", souligne Delphine Lacanette-Puyo, responsable de l'instrument. "Il permet de réaliser des expériences sur ordinateur avant d'aller éventuellement dans la grotte."
Concrètement, chacun des scénarios étudiés par le simulateur est fondé sur une modélisation de la grotte en 3D – compilation de 150 millions de mesures laser réalisées en 2005 – et des modèles physiques sur la circulation des fluides. Toujours en voie de perfectionnement, il a déjà permis d'en savoir un peu plus sur la grotte et de tester différentes configurations. Par exemple, fin 2007, il a joué un rôle important dans la décision de maintenir une cloison fermée pour juguler le développement de l'humidité. De nouveaux relevés effectués tout au long de cette année vont permettre d'affiner les simulations nécessaires au programme de conservation préventive orchestré par le ministère de la Culture. Les 12 degrés de température, observés au centième près, vont être suivis désormais au millième. Le tout grâce à une quarantaine de nouveaux capteurs qui mesureront également la vitesse d'écoulement de l'air. Sans oublier l'hygrométrie qui met à rude épreuve tout matériel installé dans la grotte: le taux d'humidité relative observé est de 99 % ! "Tout matériel introduit a une durée de vie limitée." C'est alors l'autre intérêt du simulateur: éviter de sacrifier trop souvent des instruments de mesure coûteux.