Thé vert
Illustration: Wikimol/Wikimedia Commons Une étude menée auprès de patientes qui ont eu un cancer de l'ovaire montre les limites de la pharmacopée naturelle. Vous en avez assez de la flopée d'études qui portent à croire qu'on peut soigner tous les maux de l'humanité à coup de vin rouge, de chocolat, de curcuma et d'oméga-3? Et bien voici une recherche qui montre les limites de la pharmacopée naturelle. Le thé vert ne parvient pas à empêcher la récidive du cancer de l'ovaire, rapporte une équipe de l'Université Laval dans un récent numéro de
Gynecologic Oncology.
Le filon semblait pourtant intéressant. En effet, le thé vert contient de l'EGCG (épigallocatéchine gallate) et d'autres antioxydants de la famille des catéchines qui pourraient inhiber la prolifération des cellules cancéreuses. Une étude chinoise publiée en 2004 suggérait d'ailleurs un lien entre la consommation de thé vert et la survie après un cancer de l'ovaire.
En 2010, des chercheurs de l'Institut sur la nutrition et les aliments fonctionnels (INAF) ont mis au point un procédé d'extraction des catéchines grâce auquel ils ont produit une boisson au thé vert dont le contenu en EGCG surpasse tout ce qui existe sur le marché. La concentration de la précieuse molécule serait 10 à 50 fois plus élevée dans cette boisson que dans les sachets de thé vert commerciaux.
Des chercheurs de la Faculté de médecine ont testé l'efficacité de cette boisson survoltée en catéchines grâce au concours de 16 femmes qui étaient en rémission complète après avoir souffert d'un cancer de l'ovaire. Une fois les traitements de chimiothérapie terminés, les participantes étaient invitées à consommer quotidiennement 500 ml de la boisson au thé vert enrichie en EGCG. Au cours des 18 mois suivants, seulement cinq d'entre elles n'ont pas eu de récidive du cancer. La supplémentation en EGCG n'est donc pas une avenue prometteuse pour prévenir la récurrence du cancer de l'ovaire, ont conclu les chercheurs.
"Il faut dire que le cancer de l'ovaire est souvent détecté à un stade avancé et que les récidives sont fréquentes. Il s'agit d'un cancer très agressif", souligne l'une des auteurs de l'étude, Isabelle Bairati. Les conclusions pourraient-elles être différentes s'il s'agissait d'un autre type de cancer? "Il faudrait faire des tests pour le vérifier", répond prudemment la chercheuse.
La première auteure de l'étude, Dominique Trudel, ne jette pas l'éponge pour autant. "Il serait intéressant de vérifier l'efficacité de la boisson au thé vert sur des lésions précancéreuses", avance-t-elle. Le hic: considérant l'incidence de ce cancer, il faudrait recruter un grand nombre de femmes qui accepteraient de boire du thé vert régulièrement pendant plusieurs années avant de pouvoir mesurer un effet. "Ça risque d'être difficile. Il s'agit d'une boisson relativement amère, et boire du thé vert n'est pas une habitude très répandue au Québec."
L'étude a été réalisée par Dominique Trudel, Marie Plante, Jean Grégoire, Marie-Claude Renaud, Dimcho Bachvarov, Bernard Têtu et Isabelle Bairati (Médecine), Laurent Bazinet, Alain Doyen et Monica Araya-Farias (Sciences des aliments et nutrition), Thierry Duchesne (Mathématiques et statistique) et David Labbé (McGill).
Pour plus d'information voir l'étude: http://www.sciencedirect.com/science/ar ... 5813001789