Michel - Mardi 14 Octobre 2008

Synthétiser le méthanol en douceur

C'est une sacrée performance que viennent de réaliser des chimistes de l'Institut de recherches sur la catalyse et l'environnement de Lyon (Ircelyon): ils ont oxydé du méthane à une température inférieure à 50 °C, alors que cette réaction – qui permet la synthèse de méthanol – est actuellement effectuée au niveau industriel à plus de 600 °C !


La découverte ouvre donc la voie à une méthode plus douce de production de méthanol. Une bonne nouvelle pour l'industrie, où cette molécule est utilisée massivement comme matière première d'autres produits chimiques avec lesquels on fabrique notamment du plastique ou encore de la peinture.

Constituant majoritaire – et de loin – du gaz naturel, le méthane est le composant organique le plus simple qui soit. Revers de la médaille, "c'est aussi le plus stable qu'on connaisse", souligne Alexander Sorokin, membre de l'équipe de l'Ircelyon. Pas étonnant donc que les chimistes n'aient jamais réussi jusqu'à ce jour à oxyder en méthanol à basse température cette molécule peu réactive. Et cela, même s'ils suivaient depuis plus de vingt ans une piste particulièrement prometteuse: celle des bactéries. En effet, certaines d'entre elles, qui vivent enfouies dans le sol des marais, rizières et autres tourbières, utilisent le méthane comme source d'énergie. Et au passage, elles le transforment justement en méthanol. Les scientifiques tentaient ainsi de reproduire en laboratoire l'activité des enzymes naturelles de ces bactéries. Mais jusqu'ici sans obtenir de résultat.


Persévérants, les chercheurs de Lyon se sont engagés eux aussi dans la voie des bactéries. Mais en prenant bien soin de se démarquer de leurs prédécesseurs. Alors que les autres équipes étaient restées trop proches de leurs modèles, Alexander Sorokin et ses collègues ont simplifié au maximum les enzymes. Ils ont mis au point un nouveau catalyseur de la réaction constitué de deux atomes de fer. Ce catalyseur a réussi, alors que les autres avaient échoué, à s'associer à l'eau oxygénée. Et l'espèce chimique ainsi obtenue s'est mise à oxyder le méthane avec une très grande efficacité.

Petit bémol tout de même: les chimistes ne sont pas encore parvenus à stabiliser le méthanol ainsi obtenu qui a continué à se transformer en d'autres produits chimiques. Mais ils travaillent activement pour trouver une solution. Le jeu en vaut la chandelle, puisque cette réaction d'oxydation du méthane est "totalement propre", affirme le chercheur lyonnais. "A la sortie, en dehors du méthanol, on n'obtient que de l'eau, et le nouveau catalyseur constitué de fer n'est pas toxique. Qui plus est, ce dernier pourrait être utilisé pour transformer, toujours dans des conditions respectueuses de l'environnement, d'autres composés récalcitrants, comme le benzène notamment." L'avenir en chimie est donc dans la méthode douce.

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