Michel - Jeudi 4 Mai 2006

Saturne tourne sur elle-même plus lentement que prévu

Le magnétomètre de la sonde spatiale Cassini vient d'évaluer la période de rotation de la planète Saturne sur elle-même et le résultat est surprenant: le jour saturnien mesuré par la sonde possède une valeur sensiblement plus grande que celle mesurée par la sonde Voyager lors de son survol de 1980.


Saturne et sa lune Encelade le 10 mars 2006

Saturne est une planète gazeuse géante et sa rotation a toujours été difficile à mesurer. Son épaisse atmosphère brumeuse n'a pas une vitesse de rotation uniforme et on ne peut pas se fier aux phénomènes visibles de ses couches supérieures pour évaluer la rotation réelle de sa structure interne.

La valeur la plus communément admise pour la période de la rotation de Saturne, 10 heures 39 minutes et 22.4 secondes, avait été déduite en 1980 de l'observation par la sonde Voyager des ondes radio produites par le rayonnement solaire frappant l'atmosphère de la planète. Cependant la sonde Cassini vient de rapporter une valeur plus élevée de près de 8 minutes, différence qu'il est actuellement très difficile d'expliquer.

"Connaître précisément la période de rotation d'une planète comme Saturne est un élément très important quand on essaie d'en modéliser la structure interne", remarque Giacomo Giampieri, membre du JPL.

Une différence compatible ?


Giampieri et ses collègues ont examiné des données recueillies pendant 14 mois par le magnétomètre "fluxgate" de Cassini. Ces données ont révélé un petit signal périodique dans le champ magnétique de Saturne toutes les 10 heures et 47 minutes. Si ce signal est effectivement rattaché à la rotation du noyau solide de la planète, comme l'équipe de Cassini le propose, il n'est alors pas aisé de rendre compatible ce chiffre avec la mesure relevée antérieurement par Voyager.

"Nul ne peut sensément penser que la période de rotation de Saturne ait pu changer dans l'intervalle", explique Donald Gurnett, de l'université de l'Iowa, analyste scientifique pour la mission Cassini. Une telle variation pour une planète de la taille de Saturne exigerait une énorme énergie. Et si une telle force s'exerçait, il y aurait bien longtemps que la planète tournerait beaucoup moins vite.


Une explication possible serait que l'ionosphère électriquement chargée qui entoure Saturne puisse "glisser" relativement à la rotation de la planète. Cette ionosphère influence la forme du champ magnétique, aussi une modification du coefficient de frottement entre l'ionosphère et l'atmosphère supérieure, dû peut-être aux variations saisonnières de l'illumination solaire, pourrait expliquer la différence entre les données de Voyager et de Cassini. "Ce qui est certain c'est que ce n'est absolument pas une erreur instrumentale", affirme Gurnett, qui était également responsable des instruments de détection sur Voyager.

Oscillation libre


Les scientifiques avaient déjà utilisé le champ magnétique de Jupiter pour déterminer sa période de rotation sans ambiguïté. Comme celui de Saturne, le champ de Jupiter est généré depuis les profondeurs de la planète et s'enroule très loin dans l'espace autour de celle-ci. Mais comme il est légèrement incliné, il oscille en suivant la rotation de la planète. Cette oscillation produit un fort signal périodique dans le champ magnétique de Jupiter qui est un indicateur fiable de sa vitesse de rotation. En revanche, le champ magnétique de Saturne est aligné avec son axe de rotation, aussi aucun effet d'oscillation n'est mesurable.

La périodicité détectée par Cassini est probablement provoquée par une sorte d'anomalie magnétique à l'intérieur de Saturne, certainement reliée à la nature du noyau solide de la planète.

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