Michel - Mardi 17 Juin 2008

Du sable dans les rouages du climat

Tous les ans, des milliers de tonnes de fines particules de sable sont soulevées par le vent dans les déserts et transportées sur des milliers de kilomètres, notamment vers l'Europe et l'Amérique. Ces poussières perturbent l'atmosphère et influent sur le climat. Comment ?


Soulevées par le vent dans les régions désertiques, ici à Hombori au Mali,
les particules de sable sont transportées sur des milliers de kilomètres
et perturbent l'atmosphère.

On sait par exemple qu'elles réfléchissent la lumière du soleil ou peuvent empêcher la formation des nuages. Partout sur la planète, des scientifiques tentent de préciser la nature et l'importance de ces phénomènes. L'équation est déjà complexe, et une équipe internationale (1) comprenant des chercheurs du CNRS vient d'y ajouter une nouvelle inconnue: selon eux, en interagissant avec la lumière du soleil, ces poussières modifient aussi la composition de l'atmosphère. Ils ont déjà une preuve: en présence de lumière, les poussières minérales entraînent une diminution de la teneur en dioxyde d'azote (NO2) dans la troposphère (2), dont il est un composant minime.


"Quand elles captent les rayons ultraviolets du Soleil, ces poussières sont le siège d'une réaction où le dioxyde d'azote est transformé en nitrate (NO3–) et en acide nitreux (HNO2). C'est une “photocatalyse”, à savoir une réaction chimique qui met en jeu un catalyseur (ici, la surface des poussières) activé par la lumière, détaille Christian George, chercheur CNRS à l'Institut de recherches sur la catalyse et l'environnement de Lyon (Ircelyon) (3) et coauteur de ces travaux. Cette réaction est due à un élément souvent présent dans les poussières minérales: le dioxyde de titane (TiO2) qui constitue jusqu'à 8 % de ces dernières."

Afin d'arriver à ce résultat, les chercheurs ont travaillé sur trois types d'échantillons de poussières minérales: un provenant du Sahara, un autre importé de l'Arizona, et un dernier artificiel. "Chacun a été placé dans un réacteur opaque, équipé de lampes halogènes. Puis nous avons injecté du NO2 et mesuré la disparition de ce gaz, dans l'obscurité et une fois les lampes allumées", précise-t-il. Et les résultats ne laissent pas place au doute. Dans l'obscurité, presque rien à signaler. Mais à la lumière, la concentration du NO2 a chuté de quatre fois !

Puis les scientifiques ont cherché à savoir quelle proportion pourrait avoir ce phénomène dans l'atmosphère. Pour cela, ils ont utilisé un modèle informatique programmé pour simuler la dégradation du NO2 par des poussières transportées au-dessus du Sahara de l'Ouest lors de l'été 2002. Et il est apparu que dans ce "panache saharien", les concentrations en NO2 pouvaient baisser de 37 % ! "Cela montre que la chimie des poussières minérales en présence de lumière doit être prise en considération, pour mieux évaluer l'impact des poussières sur la composition atmosphérique", commente Christian George. Qui conclut: "Nos résultats ouvrent un grand champ d'investigation."


Notes:

(1) Geophysical Research Letters, mars 2008.
(2) Partie de l'atmosphère située entre la surface du globe et une altitude d'environ 8 à 15 kilomètres. (3) Institut CNRS / Université Lyon-I..


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