Inhibition de la croissance du bacille de la tuberculose par une de ses toxines

Publié par Isabelle le 20/05/2022 à 13:00
Source: CNRS INSB
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Certaines bactéries produisent des toxines qui leur permettent de contrôler leur propre croissance, facilitant ainsi une adaptation rapide à différents stresses ou autres agressions du système immunitaire. Les scientifiques ont caractérisé le mécanisme d'action d'une de ces toxines présente chez Mycobacterium tuberculosis, le bacille de la tuberculose. La toxine se fixe au ribosome et clive spécifiquement certains ARN messagers (ARNm) en cours de traduction. Cette activité est pour la première fois observée par cryo-microscopie électronique. Les résultats sont publiés dans la revue Nature Communications.


Mode d'action de la toxine TAC de Mycobacterium tuberculosis.
© Emmanuel Giudice et Pierre Genevaux

Les systèmes "toxine-antitoxine" (TA) à deux composants comprennent une toxine (le poison) et une antitoxine (l'antidote) qui la neutralise. Les toxines utilisent des stratégies très diverses et élégantes pour ralentir ou bloquer la croissance bactérienne en ciblant principalement des processus ou des structures essentielles tels que la synthèse des protéines, le cycle cellulaire ou les membranes. Bien qu'à ce jour les conditions spécifiques qui conduisent à l'activation de ces toxines demeurent largement inconnues, ces systèmes ont été impliqués dans divers processus cellulaires, incluant la maintenance de gènes de virulence et d'éléments génétiques mobiles, la défense contre les bactériophages, la tolérance aux antibiotiques et la virulence. En accord avec ces caractéristiques, l'étude des cibles et des mécanismes d'actions de ces toxines offre donc de nouvelles perspectives pour la découverte de nouveaux agents antibactériens.

La virulence de Mycobacterium tuberculosis, le bacille de la tuberculose, réside principalement dans ses facultés d'adaptation aux nombreux stresses qu'il rencontre au cours de son cycle infectieux, en particulier sa capacité à entrer dans un état de persistance qui lui permet de survivre chez l'hôte sans causer de maladie jusqu'à ce que les conditions deviennent plus favorables à sa dissémination, comme lorsque le système immunitaire de l'hôte s'affaiblit. De façon remarquable, Mycobacterium tuberculosis a la particularité de posséder un nombre très important de systèmes TA (plus de 80), qui pourraient participer à l'établissement de la phase de persistance chez cette bactérie.

Les scientifiques montrent qu'une fois activée, la toxine TAC de Mycobacterium tuberculosis se fixe au ribosome et coupe les ARNm en cours de traduction, provoquant ainsi un arrêt transitoire de la synthèse protéique et par conséquent de la croissance du bacille. Grâce à la cryo-microscopie électronique, ils ont pu observer pour la première fois la toxine en interaction avec le ribosome, un ARN de transfert (ARNt) et un ARNm natif ciblé par cette toxine. Cette structure montre comment la toxine entre dans le ribosome et s'appuie sur l'ARNt déjà présent pour reconnaître et cliver l'ARNm.

Cette étude met en lumière le mécanisme aboutissant à l'inhibition de la croissance du bacille de la tuberculose par une toxine. Cette compréhension très détaillée du mécanisme pourrait aider à l'élaboration de potentielles applications thérapeutiques par exemple dans l'activation contrôlée de cette toxine dans le traitement de la tuberculose.

Pour en savoir plus:
Substrate recognition and cryo-EM 1 structure of the ribosome-bound TAC toxin of Mycobacterium tuberculosis
Moise Mansour, Emmanuel Giudice, Xibing Xu, Hatice Akarsu, Patricia Bordes, Valérie Guillet, Donna-Joe Bigot, Nawel Slama, Gaetano D'urso, Sophie Chat, Peter Redder, Laurent Falquet, Lionel Mourey, Reynald Gillet, Pierre Genevaux.
Nature Communications 12 mai 2022. https://doi.org/10.1038/s41467-022-30373-w

Laboratoires:
Laboratoire de Microbiologie et de Génétique Moléculaires, Centre de Biologie Intégrative (CBI), (Université de Toulouse/CNRS/UPS.
Toulouse, France.
Institut de Génétique et Développement de Rennes (IGDR) (Université de Rennes/CNRS) - Rennes, France.

Contacts:
- Pierre Genevaux - Chercheur CNRS au Laboratoire de microbiologie et de génétique moléculaire au Centre de biologie intégrative (CBI) - Université de Toulouse/CNRS/UPS - pierre.genevaux at univ-tlse3.fr
- Reynald Gillet - Enseignant-chercheur à L'Université de Rennes 1 et à l'Institut de génétique et dévelppement de Rennes (IGDR) - Université de Rennes1/CNRS) - reynald.gillet at univ-rennes1.fr
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