Le rapport du GIEC qui s'intitule Changements climatiques 2014: conséquences, adaptation et vulnérabilité, rapport détaillé rédigé par d'éminents scientifiques et rendu public aujourd'hui à Yokohama, constitue pour les décideurs et le grand public une mine d'informations sur la manière dont les changements climatiques se répercuteront sur les générations actuelles et futures, et sur les mesures que peuvent prendre les gouvernements pour favoriser l'adaptation et réduire la vulnérabilité à ces changements.
Ecarts des températures globales de surface (1850-2013) - Illustration Wkimedia Commons/Theon
"Dans les décennies à venir, le changement climatique aura surtout des conséquences néfastes pour les villes et les infrastructures, les migrations et la sécurité, les écosystèmes et les espèces animales et végétales, la santé publique et l'approvisionnement en eau, pour ne citer que quelques exemples. Nous assisterons à une acidification accélérée des océans ainsi qu'à des sécheresses, des crues et des vagues de chaleur extrêmes. Les populations démunies et vulnérables seront les plus touchées", a déclaré Michel Jarraud, Secrétaire général de l'Organisation météorologique mondiale (OMM), qui est avec le Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE) à l'origine de la création du GIEC, en 1988.
Le rapport du GIEC expose en détail ces incidences et leurs variations régionales probables, de même que leur évolution prévue dans les décennies à venir. Il présente les éléments de preuve et les incertitudes et confirme que sans un ambitieux programme de mesures immédiates de réduction des émissions, les conséquences du changement climatique deviendront de plus en plus problématiques dans le courant du XXIème siècle. Plusieurs scénarios d'adaptation aux nouvelles conditions climatiques sont par ailleurs analysés dans le rapport.
"Ce rapport donne des indications très précieuses sur les mesures que nous pouvons prendre pour réduire notre vulnérabilité face au climat et nous adapter aux conséquences des émissions de gaz à effet de serre", a souligné M. Jarraud. "La prochaine étape consiste à "concrétiser" certains des résultats de la recherche sur le climat évalués par le GIEC en les transformant en informations pertinentes et faciles à exploiter. Grâce à une collaboration étroite, les services météorologiques nationaux et d'autres organismes compétents seront à même de fournir des services d'aide à la décision de plus en plus pointus visant à accroître la résilience et les capacités d'adaptation à l'évolution du climat et à limiter les émissions."
Le rapport confirme qu'avec les progrès de la prévision climatique saisonnière et à plus longue échéance, il est désormais possible de mettre sur pied des services climatologiques efficaces, qui se fondent à la fois sur des informations et des prévisions à caractère scientifique et sur des données socio-économiques sectorielles. Il s'agit en effet d'aider les décideurs à gérer les risques et exploiter les opportunités liés au climat et à prendre des mesures d'adaptation au changement climatique.
Les chercheurs ne se contentent pas de réduire l'échelle des modèles du climat mondial pour obtenir des prévisions et des scénarios climatiques régionaux: ils conduisent de plus en plus d'études sur les conséquences, la vulnérabilité et l'adaptation au niveau régional, sous-régional, national et local. Il est désormais possible d'affiner les services climatologiques et de mieux les cibler en fonction des besoins des utilisateurs, car les chercheurs ne ménagent pas leur peine pour déterminer comment les changements climatiques se répercuteront sur les personnes et les communautés dans une région donnée.
"En même temps que le rapport du GIEC sur Les éléments scientifiques publié en septembre dernier, cette nouvelle évaluation aidera les Membres de l'OMM à mieux se prémunir contre les aléas et les extrêmes météorologiques et climatiques. Grâce à l'amélioration constante des systèmes de surveillance du climat, des prévisions opérationnelles et des politiques d'adaptation, les services météorologiques seront mieux à même de contribuer à la prévention des catastrophes et de diffuser des alertes précoces en ce qui concerne les tempêtes, les inondations, les sécheresses et les extrêmes de froid ou de chaleur", a ajouté M. Jarraud.
Alors que les applications concrètes des informations et des prévisions relatives au climat se multiplient, environ 70 pays en développement ne disposent toujours pas des ressources et des compétences voulues pour offrir des services climatologiques à leurs citoyens. Face à cette situation, la communauté internationale a établi un Cadre mondial pour les services climatologiques (CMSC) afin d'instaurer des services véritablement opérationnels dans ce domaine et de renforcer les capacités au niveau national, régional et mondial. L'OMM joue un rôle de premier plan dans cette entreprise, avec l'aide de plusieurs organismes des Nations Unies et autres organisations internationales.
L'Afrique, par exemple, est particulièrement vulnérable au changement climatique. Or bon nombre de pays africains n'ont pas les moyens de produire ni même d'exploiter des informations climatologiques pour pouvoir s'adapter à la variabilité du climat et au changement climatique. Selon le GIEC, même si un scénario à faibles émissions de gaz à effet de serre permet de limiter à 2 °C le réchauffement du climat d'ici à 2100, les efforts d'adaptation de l'Afrique se heurteront toujours à des difficultés liées à la multiplication des sécheresses et autres phénomènes extrêmes, au bouleversement des écosystèmes, à la baisse de la productivité de l'agriculture et de l'élevage, à l'évolution des maladies à transmission vectorielle et d'origine hydrique et à d'autres facteurs de stress. L'OMM et d'autres prestataires de services peuvent aider les gouvernements africains à surmonter ces difficultés en tirant parti des derniers résultats de la recherche pour mettre en œuvre des solutions concrètes en matière d'adaptation.
Dans ce contexte, et en prenant aussi pour exemple d'autres régions et secteurs, il est possible de mettre sur pied des services climatologiques qui soient utiles à la prise de décision dans des domaines essentiels comme la santé publique, l'agriculture, la gestion de l'eau et la prévention des catastrophes. Le Cadre mondial bénéficie du soutien d'un certain nombre de pays et organismes partenaires qui entendent généraliser l'accès aux services climatologiques en Afrique, notamment via le Programme de services climatologiques pour l'adaptation en Afrique, financé par la Norvège. Grâce au soutien de plusieurs autres pays, des actions sont engagées dans d'autres régions au titre du CMSC: on mentionnera en particulier les programmes, financés par le Canada, qui portent sur la mise en œuvre du Cadre mondial à l'échelle régionale et nationale et sur les services climatologiques destinés à réduire la vulnérabilité en Haïti. Le cinquième Rapport d'évaluation du GIEC devrait donner une nouvelle impulsion à toutes ces initiatives.