Michel - Vendredi 18 Avril 2008

Les quasars, bancs de tests ultimes pour la relativité générale ?

Des astronomes ont obtenu les preuves les plus convaincantes jusqu'ici que les objets massifs courbent considérablement l'espace-temps, comme le prévoit la théorie générale de la relativité. Bien que la nature géométrique de la gravité ait été démontrée la première fois dès 1919, lorsqu'Arthur Eddington a détecté le subtil effet du Soleil sur la lumière des étoiles lointaines, de nouveaux résultats fournissent le premier véritable test de la théorie d'Einstein pour des champs gravitationnels beaucoup plus puissants.


Vue d'artiste d'un quasar

Mauri Valtonen, de l'observatoire de Tuorla en Finlande explique que ses travaux fournissent en fait la première preuve tangible de l'existence des trous noirs, objets si massifs que la théorie prévoit que l'espace-temps s'y recourbe complètement sur lui-même: "les gens se réfèrent au concept de trou noir à tout moment, mais d'un point de vue strict, on devrait tout d'abord montrer que la relativité générale reste valable pour les champs de gravitation intenses avant d'être vraiment certains que les trous noirs existent," précise le scientifique.


Le nouveau test de la relativité générale concerne un noyau galactique lointain, le quasar nommé OJ287, connu pour ses émissions périodiques d'un double éclat optique très lumineux à peu près tous les 12 ans. En 1988, Valtonen et d'autres ont suggéré que cette émission puisse être engendrée par un trou noir 18 milliards de fois plus massif que le Soleil, autour duquel gravite un second trou noir environ 200 fois plus léger. Dans un tel système binaire, l'objet le plus léger traverse la matière du disque d'accrétion du trou noir primaire deux fois par orbite, en générant à chaque fois de puissantes émissions d'énergie.

En modélisant ce système, les chercheurs devaient pouvoir tester la relativité générale en prévoyant le moment où le prochain éclat devait se produire. A l'époque, les éclats ultérieurs (qui devaient avoir lieu au cours des années 90) ne pouvaient être prévus qu'avec une précision de l'ordre de quelques semaines, ce qui était insuffisant pour tester des effets relativistes. Mais au début de l'année dernière, en se basant sur des modèles améliorés et sur des années de surveillance de OJ287, Valtonen et son équipe ont pu prévoir la date de la prochaine impulsion lumineuse: le 13 septembre 2007, avec une précision d'un jour ou deux.

Afin de pouvoir détecter l'impulsion, plus de 25 astronomes de 10 pays ont dû travailler ensemble. Ceci parce qu'en septembre, OJ287 se lève à l'est juste avant le lever de Soleil, et n'est donc visible, n'importe où sur Terre, que pendant environ 30 minutes avant que le ciel ne devienne trop lumineux. Les observations eurent lieu depuis le Japon, de la Chine, puis de l'Europe et au final depuis les îles Canaries. Au total, environ 100 mesures ont été réalisées entre le 4 septembre et le 20 octobre, en partie par des astronomes amateurs.

L'éclat du quasar eut bien lieu à cette époque, suggérant fortement qu'Oj287 était effectivement un système de deux trous noirs. En plus de vérifier l'énorme masse du trou noir primaire, les résultats ont montré que l'orbite du trou noir secondaire accusait une précession de 39 degrés par période. En comparaison, l'effet du Soleil sur notre espace-temps local provoque une précession de l'orbite de Mercure d'un peu plus de 0,1 degré par siècle !


En outre, ces travaux suggèrent que le système binaire perd de l'énergie en émettant des ondes gravitationnelles - une prédiction fondamentale de la théorie de la relativité qui attend toujours d'être vérifiée de manière directe. Lorsque cette émission n'est pas incluse dans le modèle, l'éclat du quasar est prévu pour se produire 20 jours plus tard, ce qui fournit une preuve indirecte de l'existence de ces ondes gravitationnelles. Et selon Valtonen, le taux d'émission observé pour OJ287 en font la source connue la plus intense d'ondes gravitationnelles de l'univers, et donc une bonne cible pour les interféromètres laser comme LISA, particulièrement lors de la période 2016-2019 où les prochains grands éclats sont attendus.

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