Cédric - Samedi 4 Octobre 2025

💑 Pourquoi les couples partagent souvent les mêmes troubles mentaux ?

L'attirance entre deux personnes ne se limite pas aux apparences ou aux affinités culturelles. De récents travaux montrent qu'elle peut aussi s'ancrer dans une dimension plus intime: la santé mentale. L'idée que des troubles psychiques puissent rapprocher des individus peut surprendre. Pourtant, une étude internationale révèle que ce phénomène dépasse les cultures et traverse les générations.

Les chercheurs se sont intéressés à la façon dont les couples partagent certains troubles psychiatriques. Au-delà des ressemblances sociales ou des préférences personnelles, l'étude révèle une tendance marquée: de nombreux partenaires présentent des diagnostics similaires. Les données recueillies dans trois pays apportent des éléments solides pour mieux comprendre ce mécanisme, connu sous le nom d'"accouplement assortatif".



Une étude mondiale inédite



L'analyse a porté sur plus de six millions de couples répartis entre Taïwan, le Danemark et la Suède. La diversité géographique et historique des données a permis d'examiner des tendances allant des années 1930 à nos jours. Neuf troubles psychiatriques ont été étudiés, parmi lesquels la schizophrénie, la dépression, le trouble bipolaire, l'anxiété, l'autisme, le TDAH, les addictions et les TOC.

Les résultats montrent que, pour chacun de ces troubles, les conjoints sont plus susceptibles de partager un même diagnostic que prévu par le hasard. Cette corrélation s'observe dans toutes les cultures analysées, avec seulement quelques différences selon les pays. Par exemple, les TOC ou le trouble bipolaire se retrouvent moins fréquemment associés chez les couples taïwanais que dans les pays nordiques.

Ces similitudes persistent d'une génération à l'autre, ce qui suggère un phénomène stable sur près d'un siècle. La force statistique des résultats indique qu'il ne s'agit pas d'une simple coïncidence, mais d'une tendance profonde et durable.

Des mécanismes encore mystérieux


Les chercheurs avancent plusieurs hypothèses pour expliquer cette ressemblance. Les contraintes sociales pourraient limiter le choix des partenaires chez des personnes souffrant de troubles psychiatriques, augmentant ainsi la probabilité de rencontrer quelqu'un vivant une expérience similaire. La cohabitation prolongée peut également favoriser l'apparition de troubles chez le conjoint, créant une proximité psychique au fil du temps. Enfin, partager les mêmes difficultés pourrait renforcer la compréhension mutuelle, rendant l'alliance émotionnelle plus stable et plus forte.

Ces explications ne s'excluent pas et pourraient même s'additionner. Le phénomène apparaît suffisamment constant pour envisager qu'il repose sur plusieurs facteurs imbriqués. Les chercheurs insistent sur le caractère universel des résultats, observés indépendamment des différences culturelles ou des systèmes de santé. Cette constance suggère que des mécanismes communs, encore mal identifiés, jouent un rôle déterminant.

Un impact sur les générations futures



L'étude met en lumière des conséquences importantes pour la descendance. Les troubles psychiatriques comportent souvent une composante génétique transmissible. Lorsque les deux parents partagent une même pathologie, les risques pour leurs enfants augmentent considérablement. La probabilité est alors plus de deux fois supérieure par rapport à une situation où un seul parent est concerné. Les maladies particulièrement impliquées sont la schizophrénie, le trouble bipolaire, l'addiction et la dépression.

Les enfants de ces couples représentent donc un groupe particulièrement vulnérable, nécessitant une attention accrue en matière de prévention et de suivi. Les auteurs suggèrent que les médecins devraient systématiquement prendre en compte la santé mentale des deux parents, et pas seulement du patient initial. Ces résultats apportent un éclairage précieux pour mieux comprendre les transmissions familiales et affiner les stratégies de santé publique.

Pour aller plus loin: qu'est-ce que l'accouplement assortatif ?


L'accouplement assortatif est un phénomène observé dans de nombreuses espèces animales, y compris chez l'être humain, où les individus ont tendance à choisir des partenaires qui leur ressemblent sur certains traits. Ces ressemblances peuvent être physiques — comme la taille, la corpulence ou la couleur des yeux — mais aussi comportementales ou culturelles, comme le niveau d'éducation, les croyances ou même les préférences alimentaires.

Ce biais dans le choix du partenaire ne résulte pas forcément d'une décision consciente: il découle souvent de mécanismes biologiques ou sociaux qui favorisent la reconnaissance de caractéristiques familières, l'attrait pour des signaux perçus comme compatibles, ou encore la proximité géographique et culturelle qui augmente les chances de rencontre entre individus similaires.


Ce type de sélection joue un rôle important dans l'évolution des populations. En renforçant la transmission de certains traits communs d'une génération à l'autre, il contribue à façonner la diversité génétique et culturelle d'une espèce. Chez l'humain, il peut influencer la distribution des caractéristiques au sein d'une population — par exemple en accentuant les écarts de taille ou de niveau d'études entre les couples — et avoir des effets indirects sur la santé ou l'adaptation.

L'accouplement assortatif illustre ainsi la façon dont nos choix de partenaires ne sont pas aléatoires, mais reflètent des dynamiques complexes entre biologie, environnement et société.
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