Vue d'artiste des deux planètes chthoniennes en orbite autour de leur étoile (Image fournie par l'Université de Toulouse) Les recherches sur les exoplanètes conduisent de surprise en surprise. Chaque nouvelle découverte défie les modèles élaborés à partir des connaissances tirées de notre système solaire et contribue ainsi à une meilleure compréhension de la formation de tels système.
L'une des plus récentes découvertes dans ce domaine a été réalisée par une équipe de l'Université de Montréal et de l'Université de Toulouse dans un environnement où on ne s'attendait pas à trouver des planètes, c'est-à-dire autours d'une ancienne étoile géante rouge qui en est presque arrivée à sa phase finale.
"Notre découverte a battu plusieurs 'records': ces planètes sont les plus petites, les plus chaudes, les plus rapprochées de leur étoile et les rapides qui aient été observées jusqu'à maintenant", affirme Gilles Fontaine, professeur au Département de physique de l'Université de Montréal. Tous les principaux chercheurs qui ont participé à cette recherche, dont les résultats viennent d'être publiés dans le numéro du 22 décembre de
Nature, sont de ses anciens étudiants, dont Stéphane Charpinet, de l'Université de Toulouse, qui a dirigé les travaux.
Survivre à l'enfer !
Ce système planétaire gravite autour de l'étoile joliment nommée KIC 05807616 située à environ 3900 années-lumière de la Terre, dans le voisinage des constellations du Cygne et de la Lyre. Il y a quelques milliards d'années, cette étoile ressemblait à notre soleil, quoique de taille légèrement plus petite. Puis elle s'est réchauffée progressivement et a pris de l'expansion pour atteindre jusqu'à 1000 fois son volume. Elle était alors devenue une géante rouge.
Au moins deux planètes gazeuses géantes, du type de Jupiter, orbitaient autour de cette étoile et ont ainsi été littéralement gobées par l'expansion de l'enveloppe gazeuse de leur hôte. En refroidissant, l'astre a considérablement diminué de volume, un processus qui se poursuit encore aujourd'hui et qui le mènera vers son stade final de naine blanche. Le plus incroyable, c'est que les deux planètes ont survécu à cet enfer extrême !
Elles ont évidemment perdu leurs couches gazeuses mais il subsiste des noyaux composés de fer et d'autres métaux lourds. Ces noyaux sont plus petits que la Terre et représentent respectivement 75 et 87% de la taille de notre planète. Elles sont très près de l'étoile, soit à moins de un million de kilomètres. Par comparaison, Mercure se trouve à une distance moyenne de 58 M de km du Soleil.
"Elles sont si près de leur étoile qu'elles en font le tour en cinq à huit heures", précise Gilles Fontaine. La température à leur surface peut monter jusqu'à 9 000 degrés ! Mais elles ont affronté des chaleurs beaucoup plus élevées lorsqu'elles étaient absorbées par l'atmosphère de l'étoile.
À de telles températures, les métaux ne devraient-il pas se volatiliser? "C'est en effet ce qui se produit, répond le professeur. On parle alors de sublimation parce que le métal ne passe pas par l'état liquide. Le processus se poursuit encore aujourd'hui et même dans 100 millions d'années, il subsistera encore des noyaux."
Les planètes influent sur les étoiles
Selon l'équipe de chercheurs, les deux planètes géantes n'ont pas seulement été rejointes par l'expansion de l'étoile; elles auraient aussi été attirées par elle et auraient ainsi accéléré sa perte de masse en favorisant la dispersion de son enveloppe gazeuse dans l'espace. "C'est l'aspect le plus intéressant de notre découverte, déclare Gilles Fontaine. C'est la première fois qu'on montre que des planètes peuvent avoir un effet sur l'évolution de leur étoile."
Cette découverte a été réalisée à l'aide du télescope spatial Kepler, un télescope de la NASA spécialement conçu pour rechercher des exoplanètes, notamment par le transit de celles-ci devant les étoiles. Mais l'équipe de Gilles Fontaine ne recherchait pas de planètes. Leur domaine est plutôt celui de la sismologie des étoiles à vibration variable, une catégorie dont fait partie KIC 05807616. Mais le système planétaire de cette étoile ne passe pas en transit devant l'astre qui n'avait donc pas retenue l'attention des chercheurs de planète.
"C'est en remarquant de très faibles modulations de l'ordre de 0,005% dans la luminosité de ce système, modulations produites par les différentes phases des planètes et non par la vibration de l'étoile, que nous avons déduit leur présence, explique le professeur. Il s'agit donc d'une découverte fortuite. La poubelle de Kepler renferme sans doute beaucoup d'autres trésors !"