Michel - Samedi 26 Mars 2005

Les planètes géantes pourraient abriter de l'eau en phase "super ionique"

L'eau dans l'état "super ionique" serait aussi dure que le fer et émettrait une lueur jaune. Les chimistes ont recréé les conditions qui existe à l'intérieur des planètes géantes de notre système solaire. Ils ont prouvé que l'eau à l'intérieur de ces planètes (comme Neptune) se comporterait de façon surprenante.

Les conditions au sein de telles planètes sont extrêmes: une chaleur de plus de 1000 °C et une pression 100 000 fois supérieure à celle dont nous avons l'habitude. Les substances ordinaires pourraient se comporter de manière très étrange à l'intérieur de ces mastodontes. Des études expérimentales couplées à des simulations sur ordinateurs l'ont montré pour l'eau.


Neptune vue par la sonde Voyager

Depuis quelques années on sait que l'eau dans de telles conditions ne se comporterait pas comme un solide ou un liquide normal mais existerait dans une phase "super ionique", où les atomes d'oxygène seraient essentiellement figés, mais où les atomes d'hydrogène tourbillonneraient autour à grande vitesse.


Laurence Fried et ses collègues du laboratoire national Lawrence Livermore en Californie ont essayé d'obtenir de l'eau dans cet état. Pour obtenir les immenses pressions nécessaires, l'équipe a utilisé un dispositif qui a "broyé" l'eau entre deux diamants. Puis l'eau a été chauffée à l'aide d'un rayon laser infrarouge. Se faisant, les chercheurs contrôlaient la fréquence à laquelle les molécules d'eau vibraient, et surveillaient une variation brusque dans la fréquence qui signalerait un changement d'état (de phase) de l'eau. "Nous pouvions déterminer des frontières de phase, mais nous ne savions pas vraiment ce qu'il en était de l'autre côté de la frontière", note Fried.

Une structure en treillis


Les chercheurs ont également étudié des modèles informatiques du comportement des atomes, qui ont suggéré que l'eau entre effectivement dans une phase super ionique, un état étrange entre le solide et le liquide. La traque d'un groupe d'environ 60 atomes simulés a pris des semaines, et a exigé une puissance de calcul équivalente à 1000 ordinateurs domestiques.

Le modèle a prouvé que lorsque la température et la pression augmentent, les molécules se brisent et se présentent en une structure non moléculaire plus dense que la glace normale. Au-delà, il devient super ionique. "C'est difficile à imaginer", reconnaît Fried. "La meilleure façon de se le représenter est un treillis d'atomes d'oxygène figés, entourés d'atomes d'hydrogène en mouvement" explique-t-il. Si l'eau présentait une telle phase sur Terre, elle exploserait ou disparaîtrait soudainement. Mais à l'intérieur d'une planète géante elle serait dure comme le fer et si chaude qu'elle brillerait d'un jaune lumineux.


Structure de l'eau chauffée et sous pression
à l'état normal / super ionique

"Si l'eau super ionique existe vraiment aux coeurs des planètes gazeuses géantes", spécule Fried, "il pourrait y en avoir dans cet état plus qu'il n'y en a à l'état normal dans le reste du système solaire. De plus, son excellente conductivité électrique pourrait expliquer les énormes champs magnétiques des planètes telles que Neptune et Uranus".

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