Isabelle - Mercredi 30 Septembre 2015

Un pivot de l'immunité identifié chez les plantes

Supprimer les réponses immunitaires de l'hôte compte parmi les actions essentielles des agents pathogènes. Cependant, comme tout mécanisme moléculaire, il n'est ni infaillible ni sans danger. Il le reste jusqu'à ce que l'hôte évolue, trouve le talon d'Achille et mette en place une riposte adaptée. Des chercheurs du Laboratoire des interactions plantes micro-organismes, en collaboration avec une équipe chinoise, sont non seulement parvenus à décrypter de nouveaux mécanismes immunitaires, fruits de millions d'années de coévolution entre plantes et bactéries, mais également à assembler ces derniers autour d'un noeud prenant la forme d'un véritable pivot de l'immunité végétale. Ce travail a été publié dans Cell Host & Microbe.


Figure: Réactions immunitaires au sein de la cellule végétale.
1. La plante détecte la présence de composés bactériens et active l'immunité.
2. En injectant des protéines dans la cellule végétale, la bactérie neutralise cette immunité.
3. Chez certaines plantes, ces agents "neutraliseurs" sont reconnus par un leurre. Une immunité plus forte est alors activée grâce à un pivot capable de percevoir indirectement la présence de neutraliseurs bactériens.
© Gael Esteve. Laurent Noël.


L'agent pathogène bactérien Xanthomonas cause la pourriture noire du chou en injectant des protéines particulières dans les cellules végétales afin de neutraliser le système immunitaire (fig. 1.). Dans cette course à l'armement, certaines variétés de plantes parmi l'espèce Arabidopsis thaliana, ont détourné le rôle de cette molécule. Elles présentent en effet un appât semblable à celui du système d'alerte qui se révèle être un leurre. Croyant ainsi neutraliser le système d'alerte, la bactérie va au contraire déclencher des représailles ciblées et intenses (fig. 2.). Un mécanisme comparable avait été récemment mis en évidence par des chercheurs issus du même laboratoire. Outre le décryptage d'un nouveau mécanisme de reconnaissance de la bactérie, cette nouvelle étude apporte une avancée très importante dans la compréhension de l'arrangement des différents composants du système de défense.

En croisant des approches génétiques et biochimiques grâce à une collaboration avec un laboratoire de l'Institut de Génétique et de Biologie du Développement de l'Académie chinoise des sciences, les chercheurs du Laboratoire des interactions plantes micro-organismes sont parvenus à décrypter le fonctionnement de RSK1, une molécule déjà remarquée pour son rôle générique de défense à l'encontre de plusieurs souches de Xanthomonas. RSK1 vient former un pont entre le leurre et la protéine ZAR1, cette dernière se révélant être un véritable pivot de l'immunité végétale, responsable de l'activation des défenses contre plusieurs agents pathogènes différents (fig. 3.). Pour preuve, une molécule issue de la bactérie Pseudomonas est détectée par des protéines de la même famille que RSK1 et l'interaction avec ce même pivot immunitaire ZAR1 entraîne également le déclenchement de l'immunité.

Avec la définition du rôle central de ce pivot, les chercheurs esquissent progressivement, pièce par pièce, le puzzle des réactions de défense au sein de la cellule végétale. Le rôle pionnier de ces travaux permettra finalement de tester si de tels mécanismes de défense sont aussi à l'oeuvre chez l'homme, que ce soit à l'encontre de virus, champignons ou bactéries...
Ce site fait l'objet d'une déclaration à la CNIL
sous le numéro de dossier 1037632
Informations légales