Les cryptographes quantiques doivent-ils commencer à s'inquiéter ? Contrairement à la matière ordinaire, les systèmes quantiques tels que les photons ne peuvent pas être copiés, du moins pas complètement. Néanmoins, un clonage imparfait est possible, à condition que le principe d'incertitude de Heisenberg soit toujours respecté.
Selon ce principe, la mesure de la position d'une particule la perturbe, et limite la précision avec laquelle la propriété complémentaire (sa vitesse) peut être déterminée, ce qui rend impossible de répliquer de façon fiable la totalité des propriétés de la particule.
Néanmoins, des scientifiques de l'université de Tokyo, de l'agence scientifique et technologique japonaise, et de l'université de York ont effectué la première démonstration expérimentale de "téléclonage" combinant le clonage quantique et la téléportation quantique.
Dans une téléportation idéale, la particule originelle est détruite et ses propriétés exactes sont transmises à une seconde particule distante; le principe d'incertitude ne s'applique pas dans ce cas parce qu'aucune mesure décisive n'est effectuée sur la particule initiale. Dans le téléclonage, l'original est détruit, et ses propriétés sont transmises non pas à une mais à deux particules distantes, et les propriétés de la particule d'origine sont reconstruites avec une exactitude maximum (fidélité) de moins de 100%. Le principe de Heisenberg limite cependant la possibilité de réaliser des clones puisque sans cela les chercheurs pourraient continuer à effectuer des copies de la particule initiale et tout connaître de son état.
Dans leur expérience, les chercheurs n'ont pas simplement télécloné une particule unique, mais plutôt un faisceau complet de lumière laser. Ils ont réussis à transmettre le champ électrique du faisceau, en particulier son amplitude et sa phase (mais pas sa polarisation) à deux faisceaux presque identiques, distants du premier, avec une exactitude (fidélité) de 58%. La limite théorique de l'expérience était de 66%.
Ce phénomène spectaculaire de téléclonage provient de la "magie" même de la mécanique quantique: l'enchevêtrement (ou l'intrication) quantique. Le téléclonage est différent du clonage local et de la téléportation car il exige une intrication "multipartite", une forme d'enchevêtrement dans laquelle des corrélations plus strictes sont exigées entre les particules quantiques ou les systèmes, dans ce cas-ci les trois faisceaux de lumière.
En plus de représenter un outil nouveau dans le domaine de l'information quantique, le téléclonage pourrait avoir une application exotique: l'intrusion dans les canaux de transmission de signaux quantiques cryptés. Les protocoles cryptographiques quantiques sont si sécurisés qu'ils pourraient détecter l'intervention parasite. Néanmoins, l'identité et l'emplacement de l'oreille indiscrète resteraient cachés.