Michel - Vendredi 28 Mai 2010

Le passé agité du trou noir de notre Voie lactée

Le trou noir supermassif présent au centre de notre Galaxie a connu un passé agité ces derniers siècles. C'est son voisinage qui nous le révèle: des nuages moléculaires, dont la luminosité variable en rayonnement X et gamma reflète une forte éruption passée. Ces résultats, obtenus par une équipe internationale de chercheurs dirigée par des astrophysiciens français, sont publiés dans The Astrophysical Journal.

Les trous noirs situés dans les noyaux des galaxies actives connaissent généralement une activité intense. Pas celui de notre Galaxie, Sgr A*, qui présente une activité extrêmement réduite. Mais une équipe internationale de chercheurs, dirigée par des astrophysiciens du laboratoire Astroparticule et cosmologie de Paris (CNRS / Université Paris-Diderot / CEA-Irfu / Observatoire de Paris), a pu démontrer que ce trou noir avait été actif dans un passé très récent, et qu'il n'était donc pas aussi atypique qu'il paraissait.


Figure 1. Images XMM-Newton de l'émission de la raie de fluorescence du fer neutre dans les nuages moléculaires
autour de Sgr A* (Bridge, MC1 et MC2) entre 2004 et 2009.
On voit clairement la progression de l'émission dans les sous-régions marquées par les ellipses 1, 2, 3 et 4 du Bridge.
La distance parcourue par l'émission est de 15 années lumières en moins de 5 ans.
L'échelle angulaire (2 arc-minutes = 15 années lumière à la distance du centre galactique)
et la direction vers Sgr A* sont aussi indiquées.
Crédit: © Ponti G., et al., 2010, The Astrophysical Journal, V. 714, p. 732-747.


Grâce à XMM-Newton et INTEGRAL, deux satellites de l'ESA auxquels le CNES, le CEA et le CNRS-INSU ont fortement contribué, les chercheurs ont pu observer les émissions X et gamma des nuages moléculaires de la région du centre galactique, voisins de Sgr A*. Surprise: ces émissions ont connu des variations spectaculaires, comme l'allumage progressif de l'un des nuages, entre 2004 et 2009, à une vitesse apparente trois fois plus élevée que celle de la lumière (Fig. 1).

Ce phénomène prouve que ces nuages réfléchissent le rayonnement de haute énergie produit par une activité intense du trou noir supermassif. L'écho de lumière nous arrive en effet avec un délai, par rapport à la lumière directe du trou noir, qui dépend de la position du nuage et du temps que le rayonnement emploie pour parcourir la distance entre le trou noir et le nuage. En observant la décroissance de l'émission gamma dans un autre nuage (fig. 2), les chercheurs ont estimé la durée et l'intensité de cette éruption, commencée il y a environ quatre siècles et qui s'est terminée au début du XXè siècle. Pendant trois cents ans, le trou noir supermassif de notre Galaxie a donc été un million de fois plus lumineux qu'actuellement.


Figure 2. La région du centre galactique vue par INTEGRAL en rayons gamma de basse énergie (20-60 keV)
à différentes époques, chaque bande pour une année différente entre 2003 et 2009.
Les différentes sources sont généralement associées à des systèmes binaires X variables.
Le cercle vert dans l'image en haut montre la position du nuage moléculaire Sgr B2.
La source gamma associée montre clairement un déclin sur 7 ans.
© Terrier R., et al., 2010, The Astrophysical Journal.

Pour en savoir plus: http://arxiv.org/PS_cache/arxiv/pdf/100 ... 4807v1.pdf
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