La tuberculose est l'une des principales maladies infectieuses humaines et des études récentes révèlent un regain inquiétant d'épidémies dues à des souches multi-résistantes. Le bacille de Koch a ainsi fait plus de 1,7 millions de victimes en 2004, selon l'OMS. Bien que funestement célèbre, peu d'informations relatives à l'origine, l'âge et la dispersion des souches appartenant au complexe
Mycobacterium tuberculosis sont disponibles. Les travaux de Thierry Wirth, Professeur au Muséum (EPHE) dans l'équipe de génétique des populations de l'UMR "Origines, structure, évolution de la biodiversité" (CNRS/MNHN/EPHE) et de Philip Supply directeur de recherche (CNRS) à l'institut Pasteur de Lille, publiés récemment dans la revue
Plos Pathogens apportent des réponses. À l'heure où la tuberculose redevient un fléau menaçant, la compréhension de sa coévolution avec l'homme depuis les temps préhistoriques est importante.
Deux lignées évolutives distinctes
Dans cette étude, il est démontré que le complexe tuberculosis est constitué de deux lignées évolutives bien distinctes, l'une avec un hôte unique,
Homo sapiens, l'autre touchant diverses espèces de mammifères (bovins, caprins, rongeurs...) et plus occasionnellement l'homme. Cette seconde lignée est également d'origine humaine, un résultat qui suggère que c'est bien l'homme qui a transmis la maladie à ses animaux domestiques et non l'inverse.
Diversification au Moyen-Orient durant la domestication
A l'aide de statistiques Bayésiennes et de marqueurs génétiques hypervariables (MIRU), l'âge du complexe tuberculosis a pu être évalué à 40 000 ans, un timing qui correspond à l'expansion des populations humaines hors d'Afrique. La diversification des principales lignées s'est faite il y environ 10 000 ans et tout indique que cet événement s'est tenu en Mésopotamie durant la domestication.
Une démographie galopante durant l'ère industrielle
Enfin, plus récemment, une forte expansion démographique, datant d'il y a 180 ans a pu être décelée dans toutes les lignées de
M. tuberculosis. Cette dernière coïncide avec les grandes périodes d'industrialisation et les changements démographiques concomitants. Dans l'ensemble, les résultats révèlent la dimension dynamique et historique de l'association Homo sapiens –
M. tuberculosis, un ménage à deux si bien décrit dans La Montagne magique de Thomas Mann.