Adrien - Mardi 18 Septembre 2012

Mesurer la "forme" du photon

Comme l'eau dans un roman d'Andrea Camilleri, la lumière n'a pas de forme propre, mais épouse la forme du "récipient" qui la contient. De même un état quantique quelconque de la lumière n'est rien d'autre qu'une manière spécifique d'occuper ce "conteneur vide", appelé à juste titre "mode", et qui décrit la forme spatiale et temporelle du champ électromagnétique. Des chercheurs de l'Institut national d'Optique du Conseil National des Recherches (Ino-Cnr) en Italie, dirigés par Marco Bellini et Alessandro Zavatta, ont démontré une technique qui réunit pour la première fois l'optique quantique et l'optique ultra-rapide, pour mesurer et analyser la forme des états quantiques lumineux d'une durée de quelques femtosecondes. L'article a été publié sur la revue Physical Review Letters.


Mesurer la "forme" du photon


"Par exemple un unique photon, qui correspond au remplissage du "contenant" avec un seul état d'excitation, peut prendre une infinité de formes différentes selon le mode qu'il occupe" affirme Marco Bellini, responsable du groupe Ino-Cnr qui a mené la recherche, "et la plus grande partie des applications possibles des propriétés quantiques de la lumière aux nouvelles technologies, comme la communication, l'informatique ou la métrologie quantique, dépend de la connaissance parfaite de cette forme".

Si on ne possède pas cette connaissance, manipuler, relever et utiliser les états quantiques de la lumière devient peu efficace ou même impossible. "Notre équipe de chercheurs a montré comment reproduire fidèlement le mode temporel d'un photon ultra court sur celui d'une impulsion lumineuse classique, afin de pouvoir le mesurer en détail avec des techniques standards. Pour le faire, nous avons utilisé un algorithme génétique, c'est-à-dire une procédure expérimental qui fait "évoluer" par des mutations et des reproductions un groupe aléatoire, dans le but qu'il s'adapte aux conditions environnementales à travers les générations successives" commente Bellini.

En plus d'avoir reconstruit les structures temporelles d'un photon déformé de diverses façons, les chercheurs de l'Ino-Cnr ont également démontré comment utiliser cette capacité pour établir de nouvelles règles de codification de l'informatique quantique. "La technique permet de mesurer la forme d'un photon et ce également quand il prend simultanément plusieurs formes distinctes" ajoute le chercheurs. "Si on attribue aux différentes formes prises par les photons les lettres de l'alphabet, nous serons ensuite capable de lire non seulement ces lettres, mais également toutes leurs superpositions quantique. La possibilité d'utiliser un alphabet composé de beaucoup de lettres et de leurs superpositions cohérentes, pour la communication quantique, offrirait d'énormes avantages par rapport aux codes standards basés sur les "qubit", c'est-à-dire sur un "alphabet" à seulement deux états possibles de polarisations de la lumière.

Ces résultats ouvrent donc des perspectives intéressantes autant dans les sciences fondamentales, pour une meilleure compréhension et analyse du comportement quantique de la lumière, que dans les sciences appliquées, pour des technologies quantiques, toujours plus sûres, efficaces et innovantes.
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