Michel - Dimanche 11 Septembre 2005

La Lune, une colonisation à hauts risques

Sur la Lune, ce qui est mortel est invisible: le vide irrespirable, les températures extrêmes et les radiations de l'espace sont en tête de liste. Le vide et la température sont gérables; les costumes spatiaux et les abris peuvent satisfaire les besoins en air et être parfaitement isolés thermiquement. Pour les radiations, c'est une toute autre affaire.


Le sol lunaire est exposé aux radiations de l'espace

La surface de la lune est exposée sans aucune protection aux rayons cosmiques et aux éruptions chromosphériques, et il est difficile de se protéger de tout ou partie de ce rayonnement. En outre, quand les rayons cosmiques frappent le sol, ils produisent une pulvérisation dangereuse de particules secondaires juste sous les pieds. Ces radiations pénétrant le corps peuvent endommager l'ADN, et amplifier les risque de cancer ou d'autres maladies.


La NASA projette envoyer des astronautes sur la Lune d'ici à 2020 et, par la suite, d'y installer un avant-poste. Avant que des personnes puissent vivre et travailler sans risque, les problèmes de rayonnement doivent être résolus. "Nous devons vraiment en apprendre davantage sur l'environnement radiatif de la Lune, en particulier si des gens sont susceptibles d'y séjourner plus longtemps que juste quelques jours", indique Harlan Spence, professeur d'astronomie à l'Université de Boston.

CRaTER, un éclaireur testeur de radiations


Pour mesurer soigneusement et cartographier cet environnement, la NASA développe LRO (Lunar Reconnaissance Orbiter), une sonde robotisée qui doit être placée en orbite lunaire en 2008. Cet éclaireur préparera le terrain pour de futures missions humaines non seulement en mesurant le rayonnement spatial, mais également en recherchant de la glace et en cartographiant la surface de la Lune avec un détail sans précédent.

Un des instruments à bord de LRO sera le télescope CRaTER (Cosmic Ray Telescope for the Effects of Radiation). "Non seulement nous mesurons le rayonnement, mais nous utiliserons aussi des plastiques qui imitent le tissu humain pour analyser la façon dont les particules fortement énergétiques pénètrent et interagissent avec le corps humain", explique Spence, responsable du projet CRaTER.

En installant les détecteurs de radiations de CRaTER derrière diverses épaisseurs d'un plastique spécial qui a une densité et une composition semblables au tissu humain, Spence et son équipe acquérront des données essentielles: exceptés les courts séjours lunaires des missions Apollo, les vols spatiaux humains n'ont eu lieu qu'à proximité de la Terre, là où le champ magnétique de notre planète assure une protection naturelle.

Sur orbite terrestre basse, les formes les plus dangereuses du rayonnement spatial sont relativement rares. C'est une bonne chose pour les astronautes, mais cela laisse les chercheurs avec beaucoup de questions sans réponse à propos de l'influence de ces radiations sur les tissus humains. CRaTER aidera à compléter ces lacunes.

Des radiations sous les pieds


Dans l'espace profond, le rayonnement provient de toutes les directions. Sur la Lune, on pourrait s'attendre à ce que le sol, au moins, allège le problème puisque le corps solide de notre satellite bloque le rayonnement d'un coté. Il n'en est rien. Quand les rayons cosmiques galactiques frappent les particules de la surface lunaire, ils déclenchent de petites réactions nucléaires qui libèrent des radiations supplémentaires sous forme de neutrons. La surface lunaire elle-même est ainsi radioactive !


Alors, qu'est-ce qui est pire pour les astronautes: les rayons cosmiques du dessus ou les neutrons du dessous ? Igor Mitrofanov, scientifique de l'institut de recherches spatiales russe à Moscou, donne une réponse sinistre: "les deux sont pires". Mitrofanov est responsable de l'autre instrument de détection du rayonnement sur LRO, le LEND (Lunar Exploration Neutron Detector), qui est partiellement financé par l'agence fédérale spatiale russe. En utilisant un isotope d'hélium, LEND pourra détecter le rayonnement neutronique émanant de la surface lunaire et mesurer l'énergie de ces neutrons.

Un premier tracé global du rayonnement neutronique de la Lune avait été effectué par la sonde Lunar Prospector de la NASA en 1998 et 1999. LEND affinera les mesures des énergies de ces neutrons, en déterminant la fraction de neutrons à haute énergie (les plus préjudiciables) et la fraction de neutrons possédant des énergies inférieures.

Avec ces nouvelles analyses à disposition, les scientifiques pourront commencer sérieusement à concevoir des costumes spatiaux, des habitats et des véhicules lunaires ou tout autre matériel, en connaissant exactement le niveau de protection nécessaire contre les rayonnements pour assurer la sécurité des futurs colons sur la Lune.

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