Adrien - Mardi 2 Décembre 2025

🚨 Des fraudes généralisées dans les publications mathématiques

Dans le paysage académique, l'obsession pour les chiffres et les classements peut parfois masquer la véritable valeur de la recherche. Des signaux d'alarme indiquent que certains systèmes d'évaluation, au lieu de favoriser l'excellence, incitent à des pratiques douteuses.

Sous la direction d'Ilka Agricola, professeure à l'Université de Marburg en Allemagne, un groupe de chercheurs internationaux a réalisé une étude approfondie sur les publications mathématiques. Mandatés par la Société mathématique allemande (DMV) et l'Union mathématique internationale (IMU), ils ont découvert des fraudes généralisées et durables, orchestrées pour augmenter artificiellement les scores de performance. Leurs résultats, d'abord diffusés sur la plateforme de prépublication arXiv, puis détaillés dans les Notices of the American Mathematical Society, ont immédiatement attiré l'attention et soulevé des inquiétudes au sein de la communauté mathématique mondiale.



Les métriques utilisées pour évaluer la qualité de la recherche, comme le nombre de publications, les citations ou le facteur d'impact des revues, sont souvent générées par des entreprises privées avec des méthodes peu transparentes. Ces indicateurs, commercialisés à l'échelle mondiale, bénéficient d'un contrôle limité de la part de la communauté scientifique. Certaines organisations frauduleuses se spécialisent dans l'aide aux chercheurs et institutions pour manipuler ces chiffres, attirées par les avantages tels que des financements accrus, des frais de scolarité plus élevés et une attractivité internationale renforcée.

L'étude cite des exemples édifiants, comme celui rapporté par Clarivate Inc. en 2019, où une université taïwanaise sans programme de mathématiques était classée comme ayant le plus grand nombre de chercheurs de classe mondiale en mathématiques. De plus, les mégajournaux, qui acceptent pratiquement tous les articles contre paiement, produisent maintenant plus d'articles par an que l'ensemble des revues mathématiques réputées sans barrière payante. Dans l'ombre, des courtiers anonymes vendent des métriques fabriquées, proposant des articles prêts à publier ou des augmentations de citations contre rémunération.

Le secrétaire général de l'IMU, Christoph Sorger, met en garde contre les risques de la 'science fake', qui non seulement perturbe la communauté scientifique mais aussi érode la confiance du public. Il explique que cette situation rend ardu le tri entre les informations valides et celles qui ne le sont pas, entravant ainsi le progrès des connaissances. De son côté, le président de la DMV, Jürg Kramer, appelle à une refonte des pratiques pour rétablir l'intégrité dans les publications mathématiques.


Les propositions de la commission incluent des mesures pour améliorer la transparence des métriques d'évaluation et renforcer les processus de révision par les pairs. L'objectif principal est de recentrer l'attention sur la contribution scientifique réelle plutôt que sur des indicateurs quantitatifs souvent sujets à manipulation. Cette initiative vise à restaurer la confiance et à garantir que la recherche mathématique continue de servir de base solide pour les avancées futures.

Le facteur d'impact


Le facteur d'impact est un indicateur numérique qui mesure la fréquence moyenne à laquelle les articles d'une revue sont cités dans une période donnée. Il est souvent utilisé comme un proxy pour la qualité ou l'influence d'une publication. Calculé par des entreprises comme Clarivate, il repose sur le nombre de citations reçues par les articles publiés dans la revue au cours des deux années précédentes, divisé par le nombre d'articles publiés durant cette même période.

Cependant, le facteur d'impact présente plusieurs limites. Il peut être influencé par des domaines de recherche où les citations sont plus fréquentes, indépendamment de la qualité. De plus, il ne tient pas compte de la diversité des types d'articles ou de leur impact à long terme. La pression pour publier dans des revues à haut facteur d'impact peut inciter les chercheurs à privilégier les sujets à la mode plutôt que des travaux novateurs mais moins cités.

Pour contrer ces problèmes, des alternatives comme les métriques basées sur l'usage ou les évaluations qualitatives sont proposées. L'objectif est de développer des systèmes d'évaluation plus équitables et représentatifs de la valeur scientifique réelle, réduisant ainsi les incitations à la manipulation. Par exemple, le mouvement pour la science ouverte encourage la publication des données et des méthodes, permettant une vérification indépendante.
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