Michel - Dimanche 21 Mai 2006

Et si, finalement, nous descendions bien du singe ?

Selon une nouvelle étude génétique, il se pourrait que nos ancêtres humains se reproduisaient encore avec leurs cousins grands singes longtemps après que les deux lignées se soient séparées. Les deux espèces auraient même pu constituer une espèce hybride complète avant de diverger une seconde fois. Si cela était, certains des fossiles les plus anciens de proto humains ne seraient plus que les représentants d'une première tentative avortée de différenciation avec les grands singes, plutôt que d'être nos ancêtres directs.


Un arbre généalogique plus complexe que prévu ?

Selon David Reich, un généticien de l'université Harvard à Cambridge, dans le Massachusetts, nous pouvons observer les traces de cette histoire complexe dans le génome humain actuel. Reich et ses collègues ont comparé les génomes des êtres humains, des chimpanzés et des gorilles à l'aide d'une "horloge moléculaire" pour tenter de dater l'époque à laquelle ces trois groupes ont divergé. Plus loin dans le temps deux espèces ont divergé, plus nombreuses seront les différences qui se seront accumulées dans leurs génomes.

L'équipe a estimé que les deux espèces avaient divergé il y a au maximum 6,3 (voire 5,4) millions d'années, en dépit du fait que certaines parties de leurs génomes aient divergé bien avant. Mais même si nous nous sommes différencié de nos cousins singes il y a 6,3 millions d'années, c'est encore plus récent que certains des fossiles les plus anciens montrant des caractéristiques humaines telles que la structure dentaire et la bipèdie "Cela rend d'ailleurs ces fossiles encore plus intéressants", remarque Reich. "Qui étaient-ils ?".

La réponse pourrait provenir d'une autre observation étonnante. L'équipe de Reich a constaté que le chromosome X a divergé plus tardivement que tout autre chromosome. Une explication à cela pourrait être que la sélection naturelle ait agi fortement sur certains gènes de ce chromosome. Et ce fait est significatif parce que dans toute espèce animale, les gènes qui rendent les hybrides moins fertiles que leurs espèces parentes ont tendance à se trouver sur le chromosome X ou son équivalent, aussi l'hybridation peut produire de fortes pressions sélectives sur ce chromosome.


La meilleure explication de ces découvertes étonnantes - les dates relativement récentes et variables de la différenciation entre les humains et les lignées simiesques, et la preuve d'une intense sélection sur le chromosome X - serait que les deux lignées se soient séparées avant la période des premiers fossiles proto humains, puis croisées de nouveau plus tard (voir la figure) lors d'une "spéciation renversée" (une différenciation des espèces qui fonctionnerait à l'envers). La sélection naturelle aurait alors favorisé les individus hybrides dont les chromosomes X ne portaient que peu de gènes qui abaissent la fertilité.

Jusqu'ici, admet Reich, tout ceci n'est qu'une hypothèse plausible, non un fait avéré. Par exemple, il a calibré son horloge moléculaire en utilisant l'époque de différenciation entre les humains et les macaques, qui est estimée à environ moins 20 millions d'années. Si cette divergence s'est produite plus tôt, cela pourrait repousser la séparation humains/singes bien plus loin dans le temps, peut-être suffisamment loin pour qu'il n'y ait aucun besoin d'invoquer une quelconque hybridation. Cependant, l'étude de Reich prouve au moins que la séparation entre les êtres humains et les grands singes fut un processus qui s'est étendu sur une période bien plus longue qu'on ne le supposait.

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