La mesure du diamètre de Canopus avec une précision encore jamais atteinte et la détection de taches sur sa surface, ont été réalisées par une équipe internationale conduite par Armando Domiciano de Souza, astronome au Laboratoire Fizeau (CNRS, Université de Nice Sophia-Antipolis, Observatoire de la Côte d'Azur-INSU). Pour ce faire ils ont utilisé l'instrument AMBER installé au
Very Large Telescope Interferometer de l'ESO au Paranal au Chili. Ces résultats permettent de mieux comprendre les phénomènes de convection pendant une phase de l'évolution stellaire encore mal connue: le passage du stade de supergéante rouge à celui de supergéante bleue et inversement, c'est la phase dite de
blue loop. Ces travaux seront publiés prochainement dans la revue
Astronomy and Astrophysics Letters .
Canopus a beau être la deuxième étoile la plus brillante du ciel nocturne après Sirius, de nombreuses zones d'ombre l'entourent. En effet, cette étoile dite de masse intermédiaire (environ 10 masses solaires) est déjà passée par la phase de sa vie durant laquelle la fusion de l'hydrogène en son coeur s'est terminée et la fusion de l'hélium a pris le relais. L'enveloppe constituée essentiellement d'hydrogène et entourant son coeur s'est étendue et donc refroidie durant la phase dite de supergéante rouge. Ensuite, comme de nombreuses étoiles de masse équivalente, la température de Canopus a fortement augmenté pour atteindre aujourd'hui plus de 7 000 °C et l'étoile est devenue une supergéante jaune. Par la suite, elle évoluera soit vers le stade de supergéante rouge soit vers celui de supergéante bleue. Cette phase dite de blue loop (car sa couleur se déplace du rouge vers le bleu en passant par le jaune et en retournant vers le rouge) est encore mal comprise et les paramètres fondamentaux qui caractérisent Canopus tels que son diamètre ou sa température doivent être connus avec une précision meilleure que celle existant actuellement afin de pouvoir affiner les modèles explicatifs.
C'est en utilisant l'instrument AMBER installé sur le VLTI de l'European Southern Observatory au Chili que les chercheurs sont parvenus à déterminer avec une précision inégalée le rayon de Canopus: plus de 71 rayons solaires !
L'image synthétisée de la face visible de Canopus comportant
une seule tâche (image de droite) a été obtenue à partir du modèle
pour lequel les valeurs (en rouge)'suivent les données interférométriques
mesurées par l'instrument AMBER sur le VLTI (en noir)
Elément inattendu, les observations effectuées sur Canopus ont permis aux astronomes de révéler la présence de taches sur la surface visible de l'étoile (photosphère). La taille de ces taches semble être de l'ordre du tiers de son diamètre, soit une taille de plus de 20 diamètres solaires ! Les modèles existants prévoyaient bien l'existence de telles cellules de convection dues au bouillonnement intense qui agite la surface de l'étoile, mais 3 à 4 fois plus petites. La détection d'une telle tache de granulation à la surface de Canopus fournit ainsi une contrainte observationnelle essentielle à l'élaboration de modèles explicatifs de la photosphère des supergéantes.
La technique utilisée ici montre que le VLTI semble désormais capable de reconstruire des images à partir de données interférométriques acquises par un réseau de télescopes, à l'instar par exemple de l'interféromètre CHARA situé en Californie. De quoi ouvrir des perspectives passionnantes pour l'étude de la convection à la surface des étoiles grâce à des images fournissant des détails jusqu'alors inaccessibles.