Un régime alimentaire carnivore chez les éponges abyssales a été découvert au Centre océanologique de Marseille il y a une quinzaine d'années. La diversité de ces éponges carnivores est grandement sous-estimée, en particulier dans le Pacifique profond. Co-signé par un chercheur du laboratoire DIMAR (Diversité, évolution et écologie fonctionnelle marine, UMR 6540 CNRS-Université de la Méditerranée Aix-Marseille II), un article à paraître dans la revue Hydrobiologia décrit trois nouvelles espèces découvertes au large de la Nouvelle-Zélande.
À gauche, une éponge carnivore de Nouvelle-Zélande, actuellement en cours de description sous le nom d'Abyssocladia sphaerichela.
À droite, une vue au microscope d'un spicule siliceux d'Abyssocladia carcharias, une des trois nouvelles espèces décrites dans l'étude. Ces spicules servent à la capture des crustacés dont l'éponge se nourrit.
Crédit photo: Jean Vacelet.
La faune des éponges carnivores abyssales dans le sud-ouest de l'océan Pacifique s'avère d'une diversité remarquable, au point que la plupart des espèces qui y sont collectées sont inconnues des chercheurs. C'est notamment le cas au large de la Nouvelle-Zélande, d'où proviennent les trois nouvelles espèces décrites dans l'étude: Abyssocladia carcharias, Asbestopluma anisoplacochela et Asbestopluma desmophora. Ces trois espèces présentent des spicules originaux et, pour deux d'entre elles, d'un type entièrement inédit. Les spicules sont des petites particules minérales qui constituent le squelette de l'éponge et, ici, servent aussi à la capture des crustacés dont l'éponge se nourrit. Un de ces spicules fait tellement penser à une mâchoire de squale que l'espèce a été baptisée Abyssocladia carcharias en hommage au grand requin blanc, dont le nom latin est Carcharodon carcharias.
Une dizaine d'autres espèces découvertes dans la même région sont actuellement en cours de description. Etant donné l'originalité et la variété des spicules, sur lesquels se base la classification des éponges, les chercheurs ont du mal à effectuer des rapprochements et à classer ces animaux. Un obstacle qui sera difficile à surmonter par une approche moléculaire car la plupart des spécimens sont de très petite taille et, étant essentiellement composés d'un squelette minéral de silice, contiennent très peu de tissus organiques mous.