Isabelle - Mercredi 2 Juillet 2014

Connecter des processeurs quantiques hétérogènes

Des physiciens parisiens du Laboratoire Kastler Brossel (UPMC, CNRS, ENS, CdF) et florentins du Istituto Nazionale di Ottica, partenaires du projet européen QSCALE, ont mis au point simultanément une nouvelle source de lumière permettant d'échanger de l'information par téléportation entre processeurs quantiques fonctionnant avec des encodages différents. Cette double avancée dans l'ingénierie d'états quantiques de la lumière ouvre la voie à des architectures de réseaux dites hybrides.


Source de photon unique dans l'infrarouge, basée sur un cristal non-linéaire à l'intérieur d'une cavité optique pompé par un laser vert (oscillateur paramétrique optique). Illustration: UPMC/Laboratoire Kastler Brossel

Le développement des communications et du calcul quantiques repose sur un traitement spécifique de l'information. Alors qu'un bit classique ne peut prendre que deux valeurs binaires – 0 ou 1 – le bit quantique peut être suspendu entre ces deux valeurs, ouvrant ainsi des possibilités inaccessibles pour un système classique. La dualité onde-corpuscule de la lumière a naturellement conduit à deux approches. On peut par exemple utiliser l'absence et la présence de photon, utilisant ainsi la nature corpusculaire de la lumière, ou alors exploiter le signe de la phase, caractéristique d'une onde. Chacune de ses approches a ses avantages et ses inconvénients ; cependant elles sont souvent complémentaires. Transférer l'information d'un encodage à l'autre permettrait ainsi de tirer profit de cette dualité. Des chercheurs du Laboratoire Kastler Brossel à Paris (UPMC, CNRS, ENS, CdF) et du Istituto Nazionale di Ottica (INO-CNR) à Florence viennent de réaliser expérimentalement une nouvelle source de lumière qui permettrait un tel échange, ouvrant ainsi la voie à des réseaux quantiques hétérogènes. Ces travaux font l'objet de deux publications "back-to-back" dans la revue Nature Photonics.


Transférer l'information entre deux processeurs quantiques peut se faire par téléportation. Pour réaliser cette opération, deux pulses de lumière intriqués, c'est à dire qui présentent des corrélations plus fortes que toutes corrélations classiques, sont échangés. Si de telles expériences ont déjà été réalisées avec le même encodage, il est nécessaire ici de disposer de pulses de lumière bien particuliers: suivant que le premier pulse contient ou non un photon unique, le second pulse de la paire doit présenter une phase opposée. C'est ainsi une version de l'expérience de pensée du chat de Schrödinger avec des faisceaux de lumière. Pour obtenir un tel état complexe de la lumière, les équipes parisiennes et florentines ont utilisé des approches différentes. Elles reposent cependant de manière similaire sur des sources optiques non-linéaires associées à des additions ou soustractions de photons uniques pour construire ce nouvel état hybride.

Ces travaux s'inscrivent dans le cadre commun du projet européen "QSCALE: Extending the range of quantum communications" (http://chistera-qscale.eu), coordonné par le Laboratoire Kastler Brossel et financé par l'ERA-NET CHIST-ERA. L'ERA-NET CHIST-ERA (Recherche Européenne Coordonnée sur les Défis à Long-terme en sciences et technologies de l'information et de la communication) est une activité de coordination et de coopération d'agences nationales de financement de la recherche en Europe soutenue par le 7ème PCRD. Le consortium est coordonné par l'Agence Nationale de la Recherche – ANR http://www.agence-nationale-recherche.fr/.
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