Isabelle - Lundi 4 Août 2014

Comment rendre les "antibiotiques vivants" plus efficaces ?

Les bactériophages (ou phages) sont des virus qui n'affectent que les bactéries. Une piste de recherche actuelle vise à les utiliser comme "antibiotiques vivants" contre les bactéries résistantes aux antibiotiques. Parmi celles-ci, Pseudomonas aeruginosa est une bactérie responsable de certaines infections nosocomiales parfois mortelles. Lors d'une étude publiée récemment dans la revue PNAS, une équipe composée de chercheurs de l'Institut des Sciences de l'Evolution de Montpellier - ISEM (CNRS / Université Montpellier 2 / IRD) a observé un phénomène très particulier chez les phages de cette bactérie, qui pourrait aider à augmenter leur virulence. De quoi mieux combattre P. aeruginosa.


Inhibition de l'aeruginosa PAO1 de P. par son bactériophage LUZ19. Les colonies colorées dans la zone sombre sont indicatives de l'évolution de la résistance par la bactérie. Images prises en utilisant la fluorescence naturelle de l'aeruginosa. Illustration: CNRS/INEE/Alex Betts


Plus précisément, les chercheurs ont noté qu'après plusieurs rencontres entre P. aeruginosa et ses phages, la virulence de ceux-ci peut, selon le type des phages, soit fluctuer au fil du temps soit, chose plus intéressante, augmenter.

L'équipe a fait cette découverte en tentant de mieux comprendre une interaction précise entre Pseudomonas aeruginosa et les phages n'infectant qu'elle: leur "co-évolution", c'est-à-dire la manière dont la résistance de P. aeruginosa à ses phages et la virulence de ces derniers vis-à-vis d'elle, évoluent lorsque la bactérie est en contact avec ses phages pendant un certain temps.
Les biologistes se sont intéressés à six phages différents (LKD16, PEV2, LUZ19, LUZ7, 14/1 et LMA2). Ceux-ci ont été mis individuellement en contact avec la bactérie, dix fois de suite pendant 24 heures. Puis, les chercheurs ont étudié si ces rencontres successives pouvaient induire l'émergence de phages mutants avec une virulence accentuée vis-à-vis de P. aeruginosa.

Leur étude montre que les phages de P. aeruginosa peuvent co-évoluer de deux manières différentes selon leur type. Les phages LUZ7, LUZ19 et LDK16 ont montré une virulence fluctuante dans le temps. Par contre, les trois autres virus (PEV2, 14/1 et LMA2) ont, eux, vu leur virulence augmentée.

"Ces résultats suggèrent qu'il est possible, pour certains phages de P. aeruginosa, d'augmenter leur virulence et leur efficacité en utilisant des formes coévoluées. Pour les autres phages, les échantillons non coévoluées sont les plus efficaces contre P. aeruginosa", pécise Michael Hochberg, biologiste à l'ISEM.

Ces travaux pourraient avoir des enjeux sociétaux importants, et intéresser non seulement les médecins, mais aussi les sociétés de traitement de l'eau, désireuses d'éradiquer P. aeruginosa de leur circuit de traitement.
Ce site fait l'objet d'une déclaration à la CNIL
sous le numéro de dossier 1037632
Informations légales