Trafic routier, sonneries de téléphone, klaxons, bruit de chantiers ou d'usines, cris humains, aboiements...: les villes sont le siège d'un brouhaha quasi omniprésent qui nuit à de nombreux animaux. Jusqu'ici, plusieurs études avaient montré que cette pollution sonore anthropique (liée aux activités humaines) perturbait la communication vocale des oiseaux. Une nouvelle étude menée sur des moineaux au Centre d'Etudes Biologiques de Chizé (CNRS / Université de La Rochelle), suggère que le bruit urbain aurait un autre effet négatif important, peu étudié jusque-là: il pourrait aussi affecter la capacité des volatiles à bien s'occuper de leurs petits. Les détails ont été publiés récemment dans la revue
Behavioral Ecology.
Prise de son de bruits de circulation sur le Vieux-Port à Marseille. – © CNRS Photothèque / MEDARD Laurence
Les écologistes Alizée Meillère, François Brischoux et Frédéric Angelier ont analysé le comportement de moineaux adultes vivant soit dans un milieu naturel "calme" (volume sonore: 43 décibels) ; soit dans un environnement parasité de manière expérimentale par un bruit routier (son enregistré en bordure du périphérique parisien et diffusé par haut-parleurs: 63 dB).
A deux moments clefs du développement des poussins - au début de la période de couvaison et au début de la période d'élevage des petits -, les chercheurs ont mimé une menace s'approchant du nid, personnalisée par un expérimentateur. Puis ils ont mesuré la distance à laquelle se trouvait celui-ci, lorsque les moineaux adultes s'enfuyaient de leur nichoir.
Comparés aux oiseaux dans l'environnement "calme", les oiseaux dans l'environnement bruyant s'enfuyaient en moyenne plus tôt, quand l'expérimentateur se trouvait à une distance plus grande de leur nid: à 12 mètres, contre 3 m.
D'où la conclusion que le bruit induit un comportement de fuite précoce des parents moineaux en réponse à un danger.
"Tout se passe comme si les oiseaux exposés au bruit urbain, augmentent leur vigilance pour compenser leur moins bonne perception auditive des menaces approchant dans leur environnement ", précise Frédéric Angelier.
Or,
"si cette modification du comportement anti-prédateur des moineaux augmente les chances de survie des parents, elle pourrait aussi diminuer les chances de survies des poussins", souligne le chercheur.
Et pour cause: en prenant la fuite de façon précoce, les parents laissent les oeufs et les poussins livrés à eux-mêmes, sans nourriture et plus exposés aux menaces.
Ces travaux ont été cofinancés par l'association Fyssen qui promeut la recherche sur les comportements et les processus cognitifs des animaux et des humains.
Une ligne aérienne du métro parisien. – © CNRS Photothèque / COAT Gwenaële