Une technique rapide et efficace d'amélioration d'images, développée initialement au NIST (National Institute of Standards and Technology) pour des clichés monochromes réalisés sous microscope s'est révélée également pertinente à l'autre extrémité de l'échelle de l'univers: la correction de détails sur des images en couleur de galaxies lointaines produites par le télescope spatial Hubble.
La galaxie du Tétard UGC 10214 photographiée en 2002 par Hubble (à gauche)
L'application de la méthode "APEX" révèle le détail d'objets en premier plan
et de galaxies du fond de l'univers en arrière-plan (à droite)
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Réduire le flou d'une photographie est un problème commun à tous les systèmes de traitement d'images aussi bien pour le grand public que pour l'instrumentation scientifique. Mathématiquement, rendre floue une photo peut être considéré comme une suite d'opérations mathématiques qui sont appliquées en chaque point de l'image et qui résultent en l'extension et la diffusion de ce point. En principe, si l'on connaît la fonction de brouillage, c'est-à-dire l'ensemble exact des opérations, une tache floue peut être supprimée par une délicate analyse numérique, en faisant attention à ne pas amplifier le bruit.
Mais bien entendu, ordinairement on ne connaît pas cette fonction. Bien des éléments peuvent intervenir: le déplacement de l'objet, le mouvement de l'appareil de prise de vues, les défauts du système optique, les effets atmosphériques... la liste est longue. En règle générale, la transformation mathématique précise est inconnue. En 2001, le mathématicien Alfred Carasso du NIST avait développé une technique, la méthode "APEX", solution générale pour une classe limitée particulière de taches floues, symétriques et possédant certaines autres caractéristiques mathématiques. APEX est fondée sur une hypothèse de simplification importante qui lui permet d'être une méthode rapide et qui travaille "à l'aveugle": elle n'a pas besoin de connaître à l'avance la fonction sous-jacente de diffusion des points, mais peut la déduire de l'image.
N'importe quelle photographie ne peut pas être améliorée par cette méthode en raison de ses hypothèses fondamentales, mais néanmoins un bon nombre d'images conviennent. Au NIST, APEX fut initialement appliquée pour des clichés réalisés au microscope électronique, puis a été utilisé dans le domaine de l'imagerie médicale.
Dans un article récent paru dans
Optical Engineering, Carasso décrit l'utilisation de la méthode APEX pour les images astronomiques, comme les clichés en couleur réalisés par l'instrument ACS (Advanced Camera for Surveys) du télescope Hubble. La technique de suppression du flou est dans ce cas plus complexe, parce que la fonction de diffusion (inconnue, ici encore) peut être différente pour chaque composante de couleur. Et selon Carosso, personne ne s'attendait à ce que la méthode fonctionne. Malgré tout, APEX a détecté et rectifié correctement les fonctions de brouillage optique de plusieurs images cosmiques. Il en est résulté des images spectaculairement améliorées de plusieurs clichés bien connus de Hubble, comme celles des galaxies du Tourbillon (Whirlpool) et du Têtard (Tadpole). "Il faut de la chance en recherche scientifique", indique Carasso. "Parfois une formule simple, basée sur une bonne intuition, fonctionne bien mieux que ce que l'on n'avait jamais cru devoir espérer".