Les voitures ne sont pas les seules à miser sur la fée électricité pour le 21e siècle. Les satellites de télécommunication et d'exploration spatiale connaissent, eux-aussi, une véritable révolution. Le CNES met tout en oeuvre pour que l'Europe se maintienne dans la course.
Cure d'électricité pour les satellites
Les satellites ne cessent de prendre du poids, environ 300 kg par an pour les satellites de télécommunication ! Et plus de la moitié de cette surcharge pondérale est due aux carburants embarqués. Les ingénieurs ont donc décidé de leur faire subir une petite cure d'amincissement en adoptant une propulsion non plus chimique mais électrique - le CNES travaillant sur cette nouvelle technologie depuis les années 90 à travers le projet Stentor. En remplissant les réservoirs d'un gaz comme le xénon, et non plus d'un classique mélange oxygène-hydrogène liquide, les satellites peuvent espérer diviser leur poids par 2. Pourquoi parle-t-on de propulsion électrique
(1) ? Parce que les ions de xénon sont éjectés du moteur par un champ électrique
(2). Seul petit bémol: la puissance électrique produite par les panneaux solaires du satellite est limitée et, par conséquent, la poussée aussi.
Le propulseur à plasma: propulseur stationnaire PPS®1350-G utilisé pour le contrôle d'orbite et le transfert d'orbite des satellites et des sondes spatiales. Crédits: Eric Drouin / Snecma / Safran Vers des satellites télécom 100% électriques
Certains satellites de télécommunication utilisent d'ores et déjà un moteur électrique pour se maintenir sur leur orbite géostationnaire
(3) mais pas encore pour la rejoindre. La raison ? La propulsion chimique leur permet de faire le trajet en une dizaine de jours alors qu'il leur faudrait entre 3 et 6 mois avec la propulsion électrique. Néanmoins, le gain de masse et de coût espéré avec le xénon - au-dessous d'un certain seuil, chaque kilo en moins pouvant représenter une économie de 20 000 euros - a fini par séduire les opérateurs de télécom. La course à la propulsion électrique est donc aujourd'hui officiellement lancée.
Le constructeur Boeing annonce le lancement des tous premiers satellites de télécom 100 % électrique début 2015, suivi de près par Airbus Defence & Space. De son côté, le CNES travaille d'ores et déjà sur la plateforme hybride Neosat, capable de combiner propulsion chimique et électrique. Un changement de technologie qui ne sera pas sans conséquence sur la conception des lanceurs...
Les sondes et les vaisseaux d'exploration planétaires ont rapidement été séduits par la propulsion électrique, la faible poussée n'étant pas trop pénalisante pour les voyages au long cours et l'endurance de poussée représentant, à l'inverse, un véritable avantage. Il y a plus de 10 ans, la sonde lunaire européenne Smart-1, réalisée avec le soutien du CNES, démontrait déjà la faisabilité et la pertinence de ce type de propulsion. Lancée en 2003 avec 80 kg de xénon, le moteur de la sonde
(4) a, en effet, pu fonctionner pendant près de 5 000 h !
Le prochain projet de l'ESA faisant appel à la propulsion plasmique est la sonde BepiColombo: son module électrique devrait lui permettre de voyager 6 années durant pour rejoindre la planète Mercure. Côté vaisseau spatial, la technologie est également très séduisante. Grâce à elle, les américains envisagent même de rejoindre la planète Mars en seulement 39 jours... Mythe ou réalité ?
Transportant l'atterrisseur franco-allemand Mascot, la sonde japonaise Hayabusa-2 va rejoindre l'astéroïde 1999 JU grâce à ses 4 moteurs ioniques. Rencontre prévue en 2018. Crédits: DLR
Notes:
(1) aussi qualifiée de propulsion plasmique ou ionique
(2) parfois couplé à un champ magnétique
(3) située à 36 000 km de l'altitude de la Terre
(4) moteur à effet Hall PPS®1350-G de la société Snecma